Agrippe le temps !

Tâte le temps qui passe
Ne l’effleure-pas
Attrape-le
Touche-le
Goûte-le
Agrippe-le !

Es-tu aveuglé·e par son feu ardent, qui brûle tous les instants ?
As-tu peur d’être brûlé·e à ton tour ?
Pars avec lui, laisse-toi glisser sur sa pente
Prends-le.
Emporte-le avec toi.
Pour qu’il ne te quitte plus jamais

Rien ne nous est dû
Tout est à savourer
Tout de suite, là, maintenant

Vas-y !
Monte sur le cheval du temps
Sois son cavalier
Et surtout, ne le presse jamais.
Car sinon, ta monture te jettera à ses pieds
Tu seras désorienté·e
Tu perdras du temps
Tu prendras du retard
Tu perdras de vue ton phare
Tu reviendras à la ligne de départ
Ton pire cauchemar.

Le temps, nous voulons le cuisiner, le contrôler
Quand nous travaillons, nous voulons qu’il file,
nous voulons le recracher, vite l’évacuer.
Quand nous aimons, nous voulons qu’il s’arrête,
nous voulons le déguster, rester piqué·es toute la vie par son sel d’été.

Le temps ne nous attend pas,
le temps ne nous attendra jamais.
Le temps s’en moque, de nous
Le temps est aveugle aux sentiments
Le temps est aveugle à l’amour
Le temps est une flamme qu’aucun pompier ne peut éteindre
Le temps est une flamme qui éclaire nos heures à la lumière de la candeur
Le temps est une flamme dont je me démets
Car non, jamais je n’y arriverai
Le temps je ne peux pas le garder,
Il s’envole, il s’échappe, le temps ne se met pas en boite
Le temps ne comprend pas les maths ou les 35 heures
Le temps est têtu, il ne veut rien entendre
Le temps court sans cesse vers la ligne d’horizon
Le temps n’est jamais fatigué,
jamais essoufflé
il n’a jamais besoin de se reposer.

Le temps est un évadé, un écorché vif
Le temps n’a jamais été enfermé,
Jamais été tenu en laisse,
Jamais cloîtré dans une cage,
Jamais, jamais, jamais.

Le temps est un tigre affamé lâché en pleine jungle
Le temps n’est pas un loup pour l’homme
Le temps peut être notre ami, si nous l’acceptons comme il est : un loup. 

Le temps est là, le temps s’envole
Le temps est un lâché incessant de colombes